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4 novembre 2004

La Bataille d'Alger

Une fois n'est pas coutume, alors pour une fois je vais vous inviter à regarder la télé.

 

Ce soir à 20.40, Arte diffuse « La Bataille d'Alger ». Ce film suit 2 émissions diffusées à l'occasion de l'anniversaire de l'indépendance de l'Algérie. Deux reportages magnifiques, quoique terribles et terrifiants autant par les images que les témoignages, sur l'histoire de la guerre d'Algérie et le rôle de l'Armée Française. Et qui m'ont fait remonter la télé qui trainaït dans ma cave.

A ma connaissance, c'est la première fois que "La Bataille d'Alger" est diffusé à la télévision, puisque ce film a été censuré en France pendant 40 ans tant il déplaisait aux 2 bords : le pouvoir politique Français, et le pouvoir politique Algérien. Puisqu'il montre les exactions dont ont été capables chacun des deux camps.

 

Il suffit de se rappeler combien de temps il a fallu pour qu'on parle de cette période comme d'une guerre, au lieu des sempiternels « évènements », « troubles », à la rigueur « insurrections », mais guerre officiellement jamais.

Ce film qui est une fiction (il n'y a aucune image d'archives) raconte comment le gouvernement Français de l'époque (la IVème République de Guy Mollet je crois), en remettant les pleins pouvoirs à l'armée Française en Algérie, a à la fois remporté une victoire militaire (les responsable Algériens luttant pour l'indépendance à Alger ayant tous été arrêtés, et/ou assassinés), tout en subissant une défaite politique (en autorisant et couvrant les  actes de tortures de l'armée Française, par la radicalisation du FLN, l'extension de la guerre sur l'ensemble du territoire, l'implication plus grande des civils…).

Ca ne vous rappelle rien d'une situation bien plus d'actualité ?

 

D'ailleurs ce film a fait école, si j'ose dire, puisque l'armée Française si « « « « efficace » » » y est décrite telle qu'elle était. Du coup ce film a été montré au Chili, en Argentine… à la grande époque des coups d'état militaires pour servir (c'est un comble) de modèle aux apprentis fachos.

Il a même été montré à l'état major US avant l'invasion de l'Irak. Comme quoi on voit que le pouvoir comprend surtout les conneries qu'il vaudrait pourtant mieux ne pas faire.

 

Mais ce film n'est pas une apologie de la guerre, pas plus qu'il ne renvoie dos à dos les uns ou les autres. Il montre simplement comment une escalade de l'horreur peut se réaliser.

L'armée Française n'y est pas exaltée ni objet de critiques systématiques. Certains chefs militaires sont montrés dans toute la complexité des choix simples et horribles qu'ils avaient à faire. Il faut se rappeler que bon nombre de ceux qui ont cautionné ou ordonné les exactions, les tortures, les viols… avaient été résistants contre les nazis, et avaient parfois eux même été arrêtés par la Gestapo avec tout ce que cela signifie.

De la même manière, il n'y a pas de complaisance avec le FLN. Ceux-ci sont montrés comme des guerriers de l'indépendance Algérienne. Mais aussi comme des « intégristes » avant l'heure puisqu'ils pronaient l'interdiction de fumer, de boire, ou de toute habitude occidentale jugée décadente. Eux aussi ont massacré et terrorisé la population civile pour la forcer à les soutenir. Sans compter les purges sanglantes qu'ils ont mené dans leurs propres rangs, dignes des meilleures épurations Staliniennes.

Tout ça pour quoi serait on tenté de dire aujourd'hui ?

 

Car ce que ce film ne peut pas raconter (vu sa date de réalisation) c'est à quel point le poids de cette décolonisation empoisonne encore –à mon sens- les rapports entre Français d'origine du Maghreb vivant en France et blancs bien franchouilles.

Car rien n'a été fait pour rétablir les vérités des uns et des autres. On n'en est à peine au début du début. Et nous vivont tous encore sous l'influence des réflexes issus des réactions à cette guerre coloniale : ceux des politiques et militaires, ceux des Français ayant combattu là-bas, ceux des Algériens (ou Marocains, ou Tunisiens) venus vivre en France, ceux des Français rapatriés d'Algérie, ceux du FLN, de l'OAS… On aura bien du mal à m'ôter de l'idée, qu'en dessous de nos histoires de banlieues, d'ascenseur social en panne, de beurs de la Xème génération, de retour du fondamentalisme, de foulards, de Marseillaise huée au Stade France… Il n'y a pas cette guerre que personne n'ose vouloir digéré de peur de s'étouffer avec.

 

Et c'est la même chose en Algérie. Le FLN, en devenant un parti unique, en mettant fin à une possible et vraie démocratie, en mettant au rencart toute une élite Algérienne, en étant incapable d'offrir des alternatives de progrès à sa population, l'Algérie a fait le lit du FIS, des barbus d'aujourd'hui et de tous ceux qui appliquent exactement les mêmes méthodes que le FLN de l'époque en remplaçant le mot indépendance par le mot islam.

 

Pour trouver un exemple, je n'ai pas besoin d'aller bien loin. Il suffit que j'écoute mon père pour qui la guerre d'Algérie n'a été pendant des années qu'un endroit ou il avait été obligé de se rendre comme appelé, des copains de régiment mobilisés comme lui, de promenades à cheval dans les champs d'orangers dont il avait la garde, etc…

Il m'aura fallu attendre 40 ans pour qu'un jour il me raconte que parfois on lui demandait de prendre un camion, avec 4 ou 5 gusses de sa compagnie, qu'on lui amenait un « Fel » qui visiblement avait passé un sale quart d'heure. Il fallait le faire monter dans le camion en pleine nuit, l'emmener dans la montagne, lui dire de descendre, de partir, et là…

Bien sûr il n'y avait pas d'ordre, mais le camion devait rentrer avec un passager de moins.

Est-ce que mon père m'a dit la vérité quand il m'a raconté qu'il donnait l'ordre au gars de déguerpir et qu'il faisait ensuite tirer en l'air son peloton ?

Je préfère probablement le croire. Car je n'ai pas de raison de douter de lui pour cela, et parce que de toute façon comment pourrais je en être sûr ?

 

Cette guerre atroce attend toujours que ceux qui l'ont conduite et couverte fassent preuve de responsabilité pour que toute une société Franco - Algérienne puisse s'en libérer. Il va falloir attendre encore combien de temps ? Parfois mon pays me fait honte.

Tintin et Les Cigares du Pharaon.

 

 

Note bis.

Pendant que j'y suis, je voudrais ajouter un petit couplet sur le jugement d'Emile Louis. Considéré comme un serial killer, Emile Louis invoque un point de droit qui est celui de la prescription. En effet les crimes qui lui sont reprochés datent de plus de 30 ans, ils sont donc prescrits et Emile Louis, même coupable, ne peut plus être poursuivi. Ses avocats ont d'ailleurs déposé un recours auprès de la Cour Européenne des Droits de l'Homme.

Et comment se fait-il qu'il ait fallu plus de 30 ans pour réagir ?

 

Le fonctionnement désastreux des services sociaux (Emile Louis a tué des handicapées mentales sous responsabilité de la DASS) et de la justice  (les poursuites précédentes n'ont jamais été suivies jusqu'au bout) est largement montré du doigt.

La cour a donc demandé aux ministres et juges en place au moment des faits de venir déposer en tant que témoins afin de comprendre comment ce qui est arrivé à pu être possible.

 

Aucun, AUCUN responsable cité ne s'est présenté à l'audience pour témoigner.

 

Voici leurs noms :

Pour les ministres, Segolène Royal, Marylise Lebranchu, Elisabeth Guiguou.

Pour les juges : Messieurs Stilinovic, Maître, Thin et Meyer.

 

Il faudra se rappeler des noms de ses ministres quand on les entendra défendre chez les cire-pompes du PAF les « vraies valeurs de la politique », le « courage de l'engagement citoyen », le "sens des responsabilités confiées par les électeurs" et j'en passe.

Ces 3 (anciennes) ministres sont elles sont assez stupides pour croire que les citoyens de ce pays sont incapables de distinguer leur responsabilité personnelle, de leur responsabilité de ministre ?

Celle qui consiste à assumer leur fonction en totalité, ne serait ce que pour témoigner des dysfonctionnements qui peuvent exister, pour que justement on puisse améliorer notre société ?

Alors elles n'ont rien à faire en politique.

Ou ont-elles simplement, et comme tant d'autres, décidé de déguiser leurs ambitions sous une image d'Epinal que rien ne doit écorner, et surtout pas le procès d'un serial killer ?

Dans ce cas là, elles ne méritent que le mépris.

 

Dire que ces 3 là se prétendent de gauche, et partager des valeurs de solidarité me donne envie de vomir.

 

Il faudra aussi se rappeler des noms de ces juges, puisqu'ils sont en exercice et continueront à prononcer des condamnations au nom de la République, c'est-à-dire en notre nom à tous.
Si les garants du respect des lois estiment qu'elles ne s'appliquent pas à eux, quelle valeur a la loi ? Alors tous ceux qui invoquent les dérapages d'une « société des juges » pour mieux échapper aux poursuites dont ils font l'objet ont déjà gagné. Et c'est nous tous qui avons perdu.

Mais merde, ça va encore durer longtemps ces conneries, ou faut encore attendre la fille de Le Pen au second tour des présidentielles ?
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Commentaires
G
quand le programme télé est arrivé chez nous, c'est à dire bien trop longtemps à l'avance, je m'étais dit qu'il faudrait que je regarde cette émission ; en lisant ce billet je m'aperçois que pour la tropbeaucouptième fois, j'ai oublié de le faire le jour venu.<br /> merci en tout cas d'avoir tenté de me le rappeler ainsi qu'aux autres visiteurs
L
Pour l'histoire d'Emile Louis, oui je sais ce que tu en penses.<br /> Au départ je voulais faire une note sur la notion de folie meurtrière et de culpabilité, mais ce sera pour plus tard.<br /> <br /> Leurs actes (Louis et Lechien) sont inexcusables.<br /> C'est justement pour cette raison que si le fonctionnement de la justice, ou ici de la Ddass est engagée, il est essentiel que personne ne se défile pour établir les faits et les circonstances qui ont rendu cela possible.<br /> <br /> C'est justement ça être un responsable politique.<br /> C'est justement là qu'on les attend.<br /> Mais à la place on a leurs tronches chez Drucker.<br /> <br /> Et pour le reste de ton commentaire... merci !<br /> :;-)<br /> J'aime bien aussi quand Barnabé rentre dans le tas.
L
Quand je vois ce qu'est capable d'entreprendre un pays comme l'Afrique du Sud, si peu de temps après la fin de l'apartheid, je me dit que les gouvernements Français devraient balayer devant leur porte avant de se poser en donneur de leçons démocratiques.<br /> <br /> Tu as raison pour la face cachée de notre propre histoire. je peux comprendre que si nos parents on fait une guerre, ce soit une telle expérience qu'elle ne puisse être racontée. Encore moins à ses enfants, par souçi de leur en épargner le récit.<br /> Il n'empêche que pourtant nous en partageons quelque chose avec eux, puisque parfois on pourrait dire qu'éviter un sujet est aussi le meilleur moyen de le désigner.<br /> Je ne suis pas partisan de devoir parler de tout à tout le monde. Certains sujets sont intimes et privés.<br /> Mais j'ai remarqué que mon père s'est senti soulagé d'avoir raconté cet épisode à ses enfants, 40 ans plus tard. Alors, rien que pour ça, il aurait dû attendre moins longtemps, juste le temps qu'on soit assez grand pour entendre ça.
L
Bien sûr, tu as raison de dire qu'il faut du temps pour panser les plaies d'une guerre.<br /> Le mot "boche" est toujours en vigueur chez nous quand nous sommes en désaccord avec notre voisin Teuton, alors qu'il n'en reste plus beaucoup des combattants de cette guerre là.<br /> Surtout ce qui m'impressionne (me dépressionne plutôt) c'est que ces guerres de décolonisation commencent à faire l'objet d'information dans les médias.<br /> Mais par nos responsables politiques ? Rien.<br /> On l'a encore vu pour la question des indemnités que touchent les Harkis et les Africains ayant combattu sous l'uniforme de notre armée.<br /> Quelle honte.<br /> Comment vouloir prétendre lutter contre les "fractures sociales" quand on préfère garder le silence sur des questions aussi essentielles.<br /> Essentielles parce que justement elles marquent profondément nos vies.<br /> Même nous, nés après cette guerre, comment croire que ce silence nous ne l'avons pas subit, et que nous n'avons pas hérité des conséquences de cette période.
M
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