J'ai Peur d'Aller A l'Ecole !
Hier midi, en partant tous les 5 déjeuner.
Les parents discutent de la pré-rentrée et rentrée de leurs "nains" qui s'annonce.
O. raconte la discussion qu'il a eu avec sa fille qui rentre en CE2.
- Elle a un peu peur de la rentrée. Mais bon, elle change d'école alors c'est ça qui doit l'inquiéter.
- Ca se passe bien à l'école ?
- Oui, aucun problème. Elle travaille bien et elle aime bien l'école.
- Bon, ben, ça devrait aller. C'est juste une inquiétude parce qu'elle arrive dans un nouvel endroit ou elle ne connaît personne ?
- N'empêche. Ca a fait ni une ni deux. Je l'ai prise à part et direct je lui ai expliqué : l'école c'est là ou on trouve le savoir. Et le savoir dans la vie c'est ce qui permet de faire partie de ceux qui contrôlent et qui décident pour les autres. Les autres c'est ceux qui obéissent. Alors tu choisis. Tu travailles à l'école si tu veux faire partie de ceux qui contrôlent, ou tu fais rien et tu feras toute ta vie ce qu'on te dit de faire.
- (gloups !)...
- (les autres) Ben ouais, c'est vrai. La vie c'est comme ça... bla bla... bla bla...
Il y a des moments ou je me traite de grand lâche.
J'aurai bien aimé dire que présenter ainsi l'école n'allait rien avoir de rassurant pour cette gamine, qui aurait plus l'impression de rentrer dans une arène pour combattre ou mourir qu'autre chose.
J'aurai pu dire que l'école c'est un lieu ou le savoir ça peut être aussi un plaisir, un lieu ou on apprend à partager (car le savoir ne vaut que s'il peut se partager), à vivre, à découvrir, rencontrer les autres. A rencontrer ses peurs et à les surmonter et les transformer. A découvir de nombreux plaisirs aussi, qui durent toute la vie.
Qu'en tout cas, même si en effet ça fait partie de la vie, l'école c'est pas uniquement la concurrence entre les enfants, la lutte pour la survie et domination de l'autre. Que ce n'est pas l'empire de la loi du plus fort (intellectuellement), même s'il faut avoir conscience que ça existe.
Et peut être que j'aurai bien aimé dire que parfois l'école, c'est pas forcément un lieu de réussite obligatoire. Qu'il y en a pour qui ça ne sert à rien, que ce n'est pas fait pour eux.
Mais que ce qui compte au fond, c'est de faire quelque chose de sa vie. Et c'est long une vie.
Mais voilà. J'étais seul contre tous. J'avais pas envie de me lancer dans de longues explications pleines de nuances, de possibilités, de critères différents... avec des collègues qui avaient décidé que le sujet du moment ne pouvait être que blanc, ou noir.
J'ai fermé ma gueule, poussé un soupir intérieur, souhaité bonne chance à la fille de O. et je me suis senti un peu lâche et un peu triste. D'une tristesse que les enfants ressentent parfois au moment de la rentrée.