T'as Le Bonjour d'Alfred.
D'abord il y a eu un gros livre, à l'épaisse couverture noire barré d'une photo inquiétante et d'un titre définitif : "Hitchcock Truffaut".
Paru en 1ère édition en 1967, et complété par Truffaut jusque dans sa version définitive après la mort de "Hitch" en 1980, ce gros bouquin rassemble les 500 questions qui ont formé les 4 ans d'entretiens entre François et Alfred.
Mon avis -autant que je vous le donne tout de suite- c'est que si vous avez un livre sur le cinéma à acheter, autant que ce soit celui-là !
On connaît l'adoration et la vénération de Truffaut pour Hitchcock, les emprunts qu'il a parfois dans ses propres films lorsqu'il y faisait une apparition lui-même, ou qu'il utilisait quelques bons trucs du maître du suspense. On connaît bien aussi à quel point Truffaut en boulimique de cinéma, avait décortiqué les films d'Hitchcock. Tout cela et bien d'autres choses, c'est dans ce livre.
Mais il y a eu mieux.
En 2004, les 52 bobines de ces entretiens sont retrouvées, et diffusées sur France Inter et France Culture.
C'est l'occasion de découvrir que d'abord que Truffaut ne parlait pas (pas beaucoup en tout cas) l'anglais, et qu'il s'était donc fait aider d'une traductrice, Helen Scott, dont la présence juste ce qu'il faut quand il faut, et la traduction permettait aux 2 compères de rebondir.
C'était aussi la possibilité d'entendre se développer entre les moments de discussion sérieuse ou Truffaut de sa voix caractéristique interrogeait Hitchcock sur tel ou tel ressort de son film, des moments rigolos comportant des anecdotes de tournage ou des (més)aventures personnelles.
Par exemple l'histoire ou Truffaut rappelle à Hitchcok les conditions de leur première rencontre. Truffaut était venu avec Chabrol, et -je vous épargne les détails - étaient arrivés tous les deux devant Hitchcock trempés de la tête au pied après être tombés dans une mare d'eau glaçée. Hitchcock, imperturbable et très britannique, n'avait fait aucun commentaire sur les 2 loustics dégoulinants en protocole de test de double pneumonie pendant toute l'interview.
Bref, dans ces entretiens radio, on entend tout ce que le livre n'arrive pas à restituer totalement. La réflexion, les moments de rigolade, et surtout une complicité naissante et de plus en plus forte entre les 3 protagonistes.
Finalement, on voit bien ce qui rassemblait les deux compères.
C'était d'avoir ce sens du spectateur, la capacité à se mettre à sa place et à partir de là à trouver toutes les astuces possibles et imaginables pour les transporter là ou eux avaient décidé de les emmener.
Je ne sais même pas si on peut les trouver en CD ces entretiens Hitchcock-Truffaut ! Mais ce serait chouette !