L'Homme Au Bras d'Or
Heureusement qu'il y a des gens biens sur cette terre, qui participent au bien commun et cherchent à améliorer le sort de l'homme et de la planète. Je vous en présente quelques uns :
George Soros A fait fortune en spéculant en bourse, à versé 15,5 millions de dollars durant la campagne électorale américaine pour que Bush ne soit pas réélu. Soutient un réseau d'ONG dans les ex pays communistes.
Bill Gates Pas la peine de le présenter, sinon pour ajouter que Mr Microsoft finance et dirige également différentes fondations pour l'alphabétisation et la médecine.
Ted Turner Préside la tête de l'un des plus grands groupes médiatiques mondiaux, Time Warner (AOL, Warner, CNN
) et verse de très grosses sommes à l'ONU[1].
Michael Milken L'inventeur des « junk bonds[2] » (créances pouries) soutient les initiatives de démocratisation des marchés de capitaux.
Ces braves gens sont donc à la fois des bienfaiteurs de l'humanité souffrante, et par ailleurs des têtes de liste du credo ultralibéral qui nous apportera bonheur et abondance : 3 voitures dans le garage, 250 chaines sur le câble, des duos Céline Dion et Lorie à qui mieux mieux, un nouveau goût au Coca Cola chaque saison, et des Mc Do bios...
Aucun paradoxe ? Ben non pourquoi ?
D'un côté, ces bienfaiteurs qui participent à la réduction des inégalités. De l'autre les mêmes qui participent aussi à la course au profit le plus fort et le plus rapide, et aux conséquences qu'elles produisent.
Puisque ces gens sont riches et puissant, ils ont certainement les moyens de s'informer et de savoir qu'aujourd'hui l'exploitation des richesses a atteint des niveaux que notre planète, et nous dessus, ne peut plus supporter.
L'homme prélèverait aujourd'hui[3] 20% de ressources naturelles de plus que ce qu'il faudrait pour que la planète puisse les reconstituer. D'ici 2050, avec une prévision démographique à 9 milliards d'individus, il faudra 40 années sans aucune exploitation des ressources naturelles par l'homme pour que la planète régénère les ressources perdues.
Moi bêtement, je pensais que ce genre de prérogatives relevait des pouvoirs et des financements politiques. Pas parce que ces gens là sont parfaits. Mais parce que je vote pour eux, que je les charge de veiller sur le bien public, aussi bien au niveau national qu'à travers des organismes internationaux. Si j'estime qu'ils font mal leur travail, je vote pour quelqu'un d'autre. Je me dis que je travaille (et j'ai cette chance), et qu'une part de mes impôts doit servir à cela aussi.
Et je m'aperçois que le financement de l'ONU dépend également de mécénat privé !? Je n'ai rien contre le mécénat, mais je ne tiens pas tellement non plus à ce que Bill Gates décide un jour des contenus des programmes scolaires parce qu'il finance des organismes d'alphabétisation. J'ai pas envie qu'un Soros décide à lui seul quelle est l'ONG qu'il convient de soutenir plutôt qu'une autre etc
Je ne vote pas pour un Bill Gates, pour un Soros ou un autre du même genre.
De la même manière que je ne trouve pas normal de me délester de mes pièces jaunes pour le compte de notre pipole présidentielle à balais. Je ne vote pas pour la compagne du président de la république. C'en est au point ou aujourd'hui, pour qu'une ONG devienne "visible" aux yeux du public, il lui faut un parrain médiatique. On voit ainsi s'installer tout un réseau de complicités subjectives et objectives entre organismes bien intentionnées (j'espère), financiers en mal d'outils de reconnaissance, de marketing et de pression supplémentaires, personnalités souhaitant construire la belle image qui les font prospérer.
Encore une fois, même si je ne trouve pas ça très reluisant, il faut bien prendre le monde tel qu'il est.
Mais s'il y a des besoins à identifier et à combler, ce n'est pas du ressort de personnes privées ou d'entreprises de décider à la place des peuples concernés.
Les états disposent des droits et moyens nécessaires pour savoir ou les besoins sont les plus pressants, à élaborer les programmes nécessaires et les mettre en uvre. Dans la proportion de 1 sur 35 millions de votants, j'exerce mon droit de contrôle et de suite.
C'est ça la démocratie.
Les politiciens sont dépositaires du pouvoir que les électeurs leurs confient temporairement. Les Soros et autres Gates sont les rois dans leurs entreprises. Je n'ai encore jamais rencontré un patron de boite qui ne m'ait regardé comme si je débarquais de la planète Mars aux mots « démocratie d'entreprise ».
Démocratie et Entreprise, ça ne va pas ensemble, ça n'existe pas.
Alors je ne suis pas très content de voir que les hommes politiques bradent là aussi les pouvoirs qu'on leur confie. Et abandonnent le terrain à ceux qui s'enrichissent le plus. Les laissent s'offrir de la main gauche les jouets médiatiques les faisant passer pour des boy scouts sauveurs du monde qu'ils contribuent pourtant à fabriquer de la main droite.
Les hommes au bras d'or ont aussi le bras de plus en plus long (boudiou, je la tiens ma conclusion à deux balles).
Je crois que je vais arrêter avec mes posts pseudos politiques, je dis toujours la même chose. A force... c'est lassant.
Ceci dit, si vous avez l'occasion je vous encourage à voir ce film d'Otto Preminger. Sinatra y joue le rôle d'un musicien, Frankie Machine, qui essaie d'échapper à la drogue. Il y a Kim Novak dans l'un de ses premiers rôles. Et et c'est vachement bien, comme tous les films de Preminger d'ailleurs. Et un de ces jours je ferais un post sur Saul Bass aussi, ce graphiste fabuleux qui signe l'affiche. D'ailleurs si quelqu'un me trouve une affiche de ce film, je lui offre de gros poutous.
... La vache, quelqu'un m'a dit d'aller voir sur movieposter.com (chouette site pour ceux qui aiment les affiches, photos de ciné), elle existe ! Et un original en bon état coute 400 Dollars US !!! Pfff...
[1] En fait Ted Turner verse une part des sommes que les USA doit à l'ONU. Les USA refusent en effet de payer leur participation depuis plusieurs années à un organisme international qu'ils jugent antiaméricain. En fait, les USA participent également au financement d'autres pays membres de l'ONU. Le refus de payer vise à faire pression sur ces pays afin de s'assurer de leur docilité. Du coup, c'est Ted Turner qui s'y colle. Merci qui ? Merci Ted. Tiens c'est combien la parabole CNN ?
[2] Junk Bonds, outil favori des traders américains des eighties. Actions à très haut risque, qui permettaient aux traders qui les revendaient (le plus vite possible avant que ça ne leur pête à la gueule) d'engranger en échange des bénéfices plus que conséquent. Couplés aux LBO (« Leverage Buy Out »), les junk bonds permettaient aux traders de faire des raids en bourse sur des multinationales solides mais endettées, pour en prendre possession, les dépecer et les revendre par appartements très très cher. Le risque rendait souvent nécessaire le recours à des délits d'initiés pour s'assurer du résultat prévu. Ce qui a envoyé bon nombre de traders en prison (mais avec les moyens de payer les cautions).
[3] Dans le rapport Planète Vivante 2004 préparé par le WWF à partir de données prises auprès de l'ONU. «Depuis 1980, nous avons franchi le seuil d'équilibre entre offre et demande. Plutôt que de vivre à partir des revenus du capital biologique de la planète, l'homme puise dans son capital». Mr Van Niel du WWF