Starbloggueur

L’Amérique de G.W.Bush est à la pointe du progrès. Si, si, j’vous jure !
Les bloggeurs de ce pays – très nombreux – sont en train de mener leur révolution au sein des médias officiels. Dernier exemple en date, un bloggeur ayant demandé à assister aux conférences de presse de la Maison Blanche s’est vu remettre une accréditation officielle après qu’un refus initial, mentionné sur son blog ait déclenché un (mini) raz-de-marée de protestation chez ses lecteurs (ici : l’article de ‘l’Expansion’).

Du coup protestation d’une partie des politiques, médias et journalistes officiels qui voient d’un mauvais œil qu’un « non professionnel » ne vienne piétiner leur chasse accréditée.

Vous imaginez ça ici, en France ? Barnabé bloggeur accrédité de l’Equipe de France de foot, Ludécrit bloggueuse officielle du Musée Schlumpf, Chiboum chez Tang Frères, ou Samantdi chez Douste Blazy (pas sympa ça, on va plutôt lui donner le choix entre le Stade Toulousain et Les Confitures Bonne Maman - ;-) )

Après tout les hommes politiques eux-mêmes (certains d’entre eux) ont découvert ce moyen d’expression directe qu’est le blog (Santini, Coppé, DSK…) et n’hésitent plus à s’en servir pour proposer et défendre leurs idées (quand ils en ont). Enfin, surtout en période pré-électorale le plus souvent. Alors ce serait comme une sorte de renvoi d’ascenceur ?

Est-ce que les médias, énervés par cette intrusion ne sont pas eux-mêmes également bloggeurs ? Des blogs de journalistes on en trouve de plus en plus sur les éditions en ligne des quotidiens comme Libé par exemple. Il y a peut être déjà des blogs sur Paris Boum Boum, Modes et Travaux, ou Point de Vue ?

Alors pourquoi tant d’histoires ?

Parce que les bloggeurs ne sont pas des journalistes officiels ? Parce que les blogs sont plus facilement des machines à rumeur que des fournisseurs d’information dûment vérifiées ? Parce qu’ils sont en train de dénaturer la valeur économique du journaliste (déjà bien entamée) ? Parce qu’un blog n’est pas transparent et que tout et n’importe quoi peut se dissimuler derrière un pseudo ?

Bien sûr qu’un bloggeur n’est pas un journaliste, c’te bonne blague !

Mais allons voir un peu du côté de ces journalistes, et des propriétaires de la presse, à qui les blogs sont en train de donner des boutons pustulifiants de la plus belle facture.

On le voit, les journaux eux-même ne lésinent pas sur les blogs ou les forums de discussion quand ceux-ci sont sous le titre de leur édition électronique (79% de la presse mondiale est aujourd’hui en ligne). Ces nouveaux services et l’édition en ligne sont peut être les solutions de demain pour une presse écrite en perte continue côté tirage papier.

Le reproche fait aux bloggeurs par la presse est d’être peu fiable.

Mais que doit-on penser d’une presse de plus en plus concentrée, de moins en moins indépendante, de plus en plus contrôlée par un petit nombre d’industriels : en France Dassault (armement), Lagardère (armement), ou Bouyghes, Pinault, Bolloré, sans parler des Murdoch, Berlusconi et autres Bertelsmann ailleurs.
Tous ces gens comme le résume dans une poésie rare le célèbre surréaliste Serge Dassault n’ont-ils pas l’envie et les moyens aujourd’hui « de faire surtout passer un certain nombre d’idées saines » dans leurs journaux. Ou de s’en servir surtout pour « vendre à Coca Cola du temps de cerveau disponible » comme l’indique le grand humaniste Patrick Le Lay.

Les bloggeurs c’est sûrement une menace bien plus forte que les torts faits à l’indépendance de la presse par les défenseurs d’intérêts économiques privés qui possèdent les médias.

Les bloggeurs seraient trop subjectifs et mélangeraient allègrement les faits et leurs interprétations (souvent fumeuses). Très bien ?!
Mais alors que doit on penser des mensonges, affabulations, intox et autres « manques de rigueur » (pour le moins) en provenance régulière de la presse sérieuse depuis pas mal de temps ?

En France, faut il rappeler comment la presse a traité l’affaire Alègre, le bagagiste d’Orly, la pédophilie à Outreau, la femme agressée racialement dans un RER, sans compter les scoop de l’interview de Castro par PPDA et autres démissions de Juppé selon Pujadas.

En Europe la façon dont Aznar a sciemment manipulé une presse en partie complice au lendemain des attentats de Madrid, normal ?

Aux USA, ces journalistes qui ont écrit des reportages totalement bidon pendant des années ont entraîné dans leur chute des titres aussi prestigieux que le New York Times ou le Washington Post qui les employaient sans contrôle car ils avaient du succès.
Ces mêmes titres ont ensuite suivi aveuglément les délires Bushiens pour préparer l’opinion à la guerre contre l’Irak (les fameux stocks d’armes de destruction massive). Sans compter les délires profonds de Fox News (on n’est pas surpris) jusqu’à la sortie par la petite porte de Dan Rather, un très grand du journalisme, après avoir diffusés de faux documents sur le passé de Bush sans les avoir vérifiés.

C’est sûr qu’un bloggeur comparé à ça c’est l’arme thermonucléaire contre le pistolet à bouchon des grands groupes de presse.

Pourtant, et bien je suis d’accord finalement avec tous ces reproches faits aux bloggeurs. Oui, les bloggeurs ne sont pas des journalistes, oui ils publient sans contrôle sur tout et n’importe quoi, oui ils ne vérifient pas toujours leurs informations et propagent parfois des rumeurs.

Mais un bloggeur n’est pas un journaliste !!!

Même si parfois il peut produire un travail digne des meilleurs d’entre eux.
Un bloggeur est un débatteur, un passeur d’idées, d’émotions, de pensées, de réflexions. Il n’a pas –par principe- à se prévaloir d’une quelconque vérité des faits et à la séparer de son commentaire subjectif (même si c’est souvent son intérêt).

Un bloggeur est un monsieur tout le monde qui partage ses idées avec d’autres messieurs tout le monde (les dames aussi bien sûr).

Qu’un bloggeur soit officiellement accrédité par un bureau de presse officiel tel que celui de la maison blanche n’est pas (qu’) une bonne chose.

Mais ce n’est pas une bonne chose pour la presse, car cela illustre par l’absurde à quel point les médias historiques et le journalisme aujourd’hui se montrent incapables de respecter les engagements de leur profession.
Bien sûr, la presse n’a jamais été, et ne sera jamais le chevalier blanc de la vérité, mais ce n’est pas ce qu’on leur demande (enfin si on est un tantinet réaliste). On leur demande au moins de faire leur travail dans les règles de l’art, et de reconnaître et tirer profit de leurs erreurs.
Et pas de subvertir les faits à d’autres buts que l’information de leurs lecteurs.

Tant qu’ils ne le feront pas, on trouvera de plus en plus de blogs qui tenteront de le faire à leur place en dépassant parfois leur rôle de commentateur et d’agitateur d’idées.

Bon, je vous laisse, une longue réunion improductive m'attend.

Comments

[LaVitaNuda]

> Barnabé.
Pfou... Presque toute la journée cette réunion...
Pas rigolo !

[LaVitaNuda]

> Barnabé.
Moi j'aime bien les remarques intempestives !!

> Ludécrit.
Bonnes vacances à toi (mais à l'heure ou je poste ce commentaire tu y est déjà).

> Adrien.
Bienvenu ici.
Ben non -à part la tienne- je n'ai pas d'autres accréditations que celles que je m'autorise !
:-)
je ne connais pas encore le livre de D.Wolton ni le blogs des correcteurs du Monde (mais ça me done envie d'y jeter un coup d'oeil).
L'ère de la grande confusion, oui certainement. Mais dans le phénomène d'accrédiation des bloggeurs, j'y vois aussi à la fois un effet de mode et un moyen de contourner la presse.
Dans le cas de bloggeur accrédité par la Maison Blanche, ou sait à quel point G.W.Bush exècre les journalistes.
Cette accrédiation lui permet de les rabaisser un peu, de les dévaloriser en les ramenant au même niveau qu'un citoyen. Car ne nous y trompons pas, il ne s'agit pas à l'opposé de valoriser l'initiative citoyenne, mais de flatter dans le sens du poil une communauté bloguienne en la désarrimant un peu plus d'une relation confiante envers le 4ème pouvoir par une accréditation qui coûte bien peu à la Maison Blanche (ce ne sont que les points presse officiels).
On le constate, le pouvoir des médias scie lui-même la branche de la crédibilité sur laquelle il s'assoit pourtant.
La réponse que les médias font avec leur propres blogs paraît bien insuffisante (mais pas inintéressante). En tout cas, insuffisante si elle ne s'accompagne pas d'une remise en cause et d'un retour aux fondamentaux du métier d'informer l'opinion.
C'est là qu'on les attend, bloggeurs ou pas. Et les pouvoirs politiques et économiques ont au fond tout intérêt à entretenir le doute. Etant donné que la dépendance économique de la presse vis à vis de ces derniers s'accroît, l'interventionnisme des propriétaires, des publicitaires et du marketing ou lobbying en tout genre ne va pas arranger la perception du public vis à vis de l'info.
Conclusion : il faut soutenir les journalistes. En les critiquant s'il le faut.

[barnabé]

Fichtre ! Super longue ta réunion !

[Adrien]

Tout d'abord merci pour votre blog (je ne sais pas si vous êtes accrédité quelque part mais vous avez là mon crédit).

La société cognitive, comme on l'appelle, semble effectivement basculer les repères habituelles sur la définition de média et donc sur le controle et la vérification de celui-ci.
Je pense que vous connaissez les positions "lexophiles" de Dominique Wolton, présentés dans son livre "Internet et après".

Le blog sont en passe d'etre récupérés par la presse, avec plus ou mois de bonheurs. Le monde.fr et repubblica.it (les deux quotidien sur le web que je lis chaque jours) en ont plusieurs (j'adore celui des correcteurs du monde.fr).

Il s'agit donc là d'une forme d'expression et d'écriture, plutot que d'un espace non institutionnel. Mais ceci ne met pas en cause l'espace spécifiques de présentation et traitement de l'information pour qu'il ne sois pas de la

Je serais de votre avis sur le fait qu'accréditer un bloggeur ne soit pas une bonne chose en soi, mais une espèce de tentation au mélange des genres. Sauf que parfois un bloggeur est aussi un journaliste (ailleurs) et que même si il ne l'est pas il peut le devenir. Le candidatures peuvent dont à mon avis être étudiées.

Pour le reste, nous sommes dans l'ére da la Grande Confusion vous savez ?

[ludecrit]

à bientôt...merci pour ta fidélité...