Playtime
Souvent il me faut de l'ordre désordonné.
J'aime faire le ménage chez moi, remettre les objets à leur place, ranger pour que ça soit joli, chasser la poussière, brûler un peu de papier d'arménie pour parfumer la pièce, laver, gratter, nettoyer. C'est barbant c'est vrai, mais en même temps ça a un effet apaisant. Plutôt qu'avaler un anxiolytique, je préfère passer l'aspirateur.
Quand tout est fini, je contemple le boulot accompli.
Je savoure l'instant, et l'allonge d'une cigarette grillée tranquillement dans mon fauteuil.
Le calme et la volupté règne.
Mais il ne faut pas que ça dure trop longtemps.
Presque aussi rapidement, j'ai besoin de semer le désordre. Eparpiller des livres et des journaux un peu partout (de toute façon c'est vite fait, c'est pas grand chez moi). Empiler les couches de vêtements sur la chaise de ma chambre. Et comme mes journées sont bien remplies, j'ai plus vite fait d'accumuler le désordre que de ranger.
Aussi, sans m'en apercevoir j'ai créé des "zones de désordre". Tel coin du salon est dédié à l'empilement des Cd, tel coin de la chambre accueille le courrier en attente de lecture, les carnets, les livres et les BD. Tel partie du frigo stocke les yaourts en dépassement de date de péremption.
Mais l'accumulation du désordre passe vite du sympathique au désagréable.
C'est comme ça que je passe de l'un à l'autre, et que ne saurais me passer des deux.
La vie (la mienne) ne peut pas être bien rangée trop longtemps.
J'aime quand dans une apparente organisation sans faille, le petit grain de sel vient gripper la machine, y introduire une dose comique incongrue, qui ridiculise d'un coup nos rêves de perfection suprématistes. Rien de mieux qu'un PC portable qui fait des siennes en pleine présentation d'entreprise. Qu'un ascenceur qui décide de lui-même là ou il s'arrêtera ou pas. Qu'un serveur de resto légèrement en état d'ébriété en slalom sur sa part de terrasse. Que l'irruption de l'être trop humain dans ses efforts désespérés à rendre chaque geste efficace.
Sur le coup ça fait pas toujours rire, surtout quand je prend 20 minutes de retard le matin à force de chercher mes clés (qui sont dans ma poche, évidemment).
L'imprévu, c'est comme une micro promesse.
Qui nous dit : tout peut vous arriver.
Qu'il ne faut jamais perdre espoir.
Et que si notre rêve se réalise.
L'imprévu fait toujours preuve d'imagination.
Le génie qui a fait ce film là, en parle bien bien bien mieux que moi.