Ho Ha, Cantona !
Je sais.
Ca risque d’en étonner plus d’un ou plus d’une.
Quoi ? Une note sur le foot chez LVN. Ca paraît aussi improbable qu’une invitation faite à Sarkozy par le PC, une émission intelligente sur TF1, de la crème au chocolat sur des frites, Bill Gates converti à Linux…
Mais quitte à parler de foot, plutôt que de dire pourquoi je ne m’y intéresse franchement plus (au point que l’équipe de France et la prochaine coupe du monde, je sais même pas ou ça en est), je préfère raconter celui avec lequel j’ai cessé de m’y intéresser.
Qui se souvient d’Eric Cantona ?
Moi en tout cas.
Pour moi, ce joueur a été le dernier des grands joueurs et le précurseur des footballeurs star-systémisés d’aujourd’hui.
Grand joueur parce qu’il avait un talent fou, et un caractère bien à lui.
L’homme a quand même réussi à se faire jeter du foot Français grâce à ses outrances. Il faut dire que quitter le terrain à Marseille ou traiter le sélectionneur national de « sac à merde », faut quand même oser. Cantona était (est) comme ça, une sorte d’irréductible, imperméable à toute tentative de domestication, rebelle sans cause à part celui de taper dans une baballe. Et fallait voir comment ! Ce qui lui a valu l’exil outre manche.
Reconnaissons que le gusse est autrement plus intéressant que les footeux d’aujourd’hui. Ses maximes philosophico énigmatiques à base de mouettes qui suivent des chalutiers éveillaient autant la stupeur que la curiosité : mais que voulait il dire ?
La totalité des journalistes sportifs cherchent encore à comprendre comme si c’était la Pierre de Rosette Cantonienne. C’est à cette époque que les rédactions de Stade 2, de l’Equipe, et de Télé Foot ont acheté un dictionnaire.
Bref, entre messages sybillins et insultes bien senties (si j’ose dire) vis-à-vis des pouvoirs sportifs, il faut reconnaître que Cantona, c’est autre chose que la langue de bois soviéto-stalinienne des footeux d’aujourd’hui.
Certains sont peut être plus talentueux (Zidane), mais si vous réussissez à vous intéresser à ce qu’ils disent, je vous tire mon chapeau. Le business règne sur le foot, et il ne fait pas bon le déranger.
Deuxième exploit. Eric Cantona est devenu le « King » en Angleterre. Exclu de la ringardise à toute épreuve du foot Français, le voilà parti à Leeds (si je me souviens bien), puis au Manchester United ou il deviendra Le Joueur Culte. Reconnaissons une chose (au moins une) aux Anglais : ils s’y connaissent en foot.
Et s’ils ont fait d’Eric Cantona un dieu vivant de la chaussure cramponée c’est pas par hasard. Et un Français en plus !
C’est lui qui a ouvert la voie à la Frencho-mania qui depuis a déferlé sur l’Angleterre du foot plus sûrement qu’une armée de cuisses de grenouilles en short, ou d’escargots au ‘garlic’.
Ses airs de matamore en carton pâte, sa façon de relever le col de son maillot (il fait froid en Angleterre pour un gars du sud comme lui), son regard façon aigle sorti du Muppet Show, son accent hilarant pour les Britiches, accompagné de son talent incroyable surtout ont fait de lui une légende en pudding là-bas.
Même ses pétages de plombs, genre Bruce Lee faisant du petit bois avec un supporter insultant, n’a pas suffit à le déboulonner au pays du fair play. Et c’est pas rien ça.
Cantona n’a jamais caché l’homme derrière le footballeur, derrière le pro, le compétiteur, et autres superlatifs idiots avec lesquels on nous vend de la performance sponsorisée Adidas. Il fallait tout prendre ou tout laisser avec lui. Le public Anglais, pas bête, à pris le tout et a eu droit a du Vrai Football pendant toutes les années ou Cantona a fait trembler les filets adverses et ses adversaires.
Il en a bien profité, interprétant son propre rôle ou le caricaturant dans des publicités à fort rendement financier. Là aussi, il a ouvert la voie à la vente de footballeur en tube, en parfum, en lotion pour la peau… Pour le meilleur et pour le pire. Le meilleur quand c’est lui qui apparaît à l’écran, plus Cantonaesque que nature, transformant chaque apparition en happening imprévisible. Le pire quand il faut se farcir l’air simplet d’un Ronaldo, ou l’émoustillance creuse d’un Beckham, à qui surtout on ne fait pas prononcer un mot (et il vaut mieux).
Voilà.
Je n’ai aucun regret de ne plus trop m’intéresser au foot.
Eric Cantona a arrêté le foot brutalement, par surprise, fidèle à ses habitudes. Il vit de ses rentes, fait le clown de temps en temps dans un film pas très bon, fait la promotion du foot de plage –pardon- il faut dire beach soccer pour faire moins ringue. Il continue à faire ce qu’il veut, et à emmerder le monde.
Mais depuis lui, le foot ne me fait plus rêver.
Voir aussi http://www.ericcantona.com/
Et pour ceux, qui pensent que le foot n’a rien à voir avec la danse, j’ai quand même trouvé ça.
PS : Barnabé : tu vois, c'est possible même s'ils n'ont pas de chaussures à crampons alu !
:)
John Guymon / Dubacko